Lorsque j’étais enfant, papa avait sur son bureau un vieux timbre en bois et métal - dont je pense qu'il s'agit de fonte - avec lequel je m’amusais à cacheter des papiers pliés en utilisant les bougies de Noël multicolores que je laissais couler. C’était assez magique de voir la bougie chaude et liquide se figer si rapidement à l’air libre pour finir habillée d’un magnifique sceau !
Ces timbres et cachets à lettres, associés à des pratiques de communication à la fois officielles et privées sont vraiment fascinants.
Qui les a inventés, à quelle époque et avec quels objectifs ?
L’utilisation des cachets et des sceaux remonte à l'Antiquité. Les premiers sceaux sont apparus en Mésopotamie (vers 3500 avant J.-C.), où ils étaient utilisés pour authentifier les documents commerciaux.
Plus tard, les Grecs et les Romains les ont adoptés et améliorés. Les sceaux de cette époque étaient souvent gravés dans des pierres semi-précieuses ou du métal et portaient des symboles ou des portraits pour identifier l'expéditeur.
Les cachets en cire, que l'on associe à l'époque médiévale et moderne, sont devenus des outils cruciaux dans la correspondance officielle et privée à partir du Moyen Âge (environ du XIIe siècle). À cette époque, ils servaient à garantir la confidentialité des lettres, à authentifier des documents, et à témoigner de l’autorité et de la légitimité des expéditeurs (souvent des nobles, des autorités religieuses, ou des institutions gouvernementales).
Il reste difficile d’attribuer cette invention à une seule culture ou époque, car les sceaux et les cachets ont évolué parallèlement dans plusieurs civilisations. Cependant, leur usage a pris de l’importance durant le Moyen Âge européen, lorsque la noblesse et le Clergé les utilisaient pour authentifier des documents officiels. En France, sous les rois médiévaux, les cachets sont devenus un symbole de pouvoir et d'autorité. À la Renaissance, ils ont connu un raffinement artistique, avec des gravures de plus en plus complexes.
Avec quels matériaux les timbres et cachets étaient-ils fabriqués ?
Les cachets ou timbres utilisés pour imprimer les sceaux étaient souvent fabriqués à partir de matériaux robustes, dont :
métal lourd de type fonte, utilisé pour sa durabilité ;
Laiton ou bronze : ces métaux étaient privilégiés pour les timbres de haute qualité et ont été fréquemment utilisés au cours des siècles
Dans certains cas, des pierres précieuses ou semi-précieuses, comme la cornaline, étaient utilisées pour les sceaux personnels.
Existait-il un seul type de cachet ou plusieurs ?
Il existait plusieurs types de cachets et de sceaux, en fonction de l’utilisation et des métiers :
Cachets royaux ou seigneuriaux : utilisés par les rois, les nobles ou les chefs religieux pour marquer des décrets officiels et authentifier des documents diplomatiques ou légaux ;
Cachets ecclésiastiques : les hauts membres du Clergé utilisaient également des sceaux pour officialiser des décisions religieuses ou des actes de propriété d'églises .
Cachets notariaux et juridiques : Les notaires et les avocats employaient des timbres pour sceller des actes notariés et des contrats, assurant ainsi leur validité légale ;
Cachets commerciaux : les marchands et les guildes médiévales avaient leurs propres cachets pour sceller des contrats ou des transactions commerciales ;
Cachets privés : les aristocrates ou les bourgeois possédaient souvent des cachets personnels pour authentifier leurs correspondances privées. Ces sceaux étaient souvent gravés avec leurs armoiries ou un symbole distinctif.
Avaient-ils des formes identiques ou différentes ?
Les cachets étaient généralement différents, car ils portaient souvent des symboles complexes, dont :
Armoiries : les familles nobles utilisaient leurs blasons pour marquer leur correspondance. On voit d'ailleurs souvent, dans des films, les rois sceller des actes avec une de leurs bagues ;
Symboles religieux : les croix, les agneaux, ou monogrammes religieux étaient fréquents sur les cachets des ecclésiastiques ;
Lettres monogrammées : les cachets privés comportaient souvent les initiales de l’expéditeur ;
Animaux symboliques : les lions, aigles, ou autres créatures étaient des représentations de force ou de noblesse.
Quel(s) type(s) de cire(s) utilisait-on pour sceller les lettres et autres documents ?
Les cires utilisées pour sceller les documents étaient principalement de deux types :
À l’origine, la cire d’abeille naturelle était utilisée, mais elle pouvait être mélangée avec d’autres résines pour obtenir une consistance plus dure et durable ;
Progressivement, la cire laquée (ou "cire à cacheter"), combinaison de cire d'abeille et de résines naturelles (comme la colophane) mélangée avec des pigments, est devenue la norme. Elle était plus dure que la cire d'abeille pure, résistait mieux au transport et ne se brisait pas facilement. La couleur rouge que nous avons tous en mémoire provenait de pigments ajoutés, souvent du cinabre (oxyde de mercure), mais d'autres couleurs comme le noir, le vert et le bleu étaient également utilisées.
Les couleurs de cire utilisées étaient-elles symboliques ou simplement esthétiques ?
Les couleurs de la cire pouvaient parfois avoir une signification spécifique :
La cire rouge était fréquemment utilisée pour des documents officiels ou royaux ;
La cire noire était associée à des événements bien tristes (annonce de décès et communications funéraires) ;
La cire verte était utilisée dans des actes juridiques de longue durée, comme des chartes ou des contrats fonciers ;
Les cires bleue et/ou or : moins courantes, elles étaient parfois utilisées dans les correspondances royales ou pour des documents de grand prestige.
En résumé...
Qu'ils soient utilisés pour des documents officiels ou pour des correspondances privées, les cachets, timbres et sceaux, incarnent une longue tradition de communication et d'autorité. Ils ont joué un rôle crucial dans l'histoire de l'Europe, particulièrement au Moyen Âge et à la Renaissance, avec des matériaux évoluant du fer forgé à la fonte, du laiton au bronze. L'utilisation de la cire d'abeille, enrichie de pigments pour des couleurs spécifiques, montre à quel point ces outils servaient non seulement à des fins pratiques, mais aussi symboliques et esthétiques.
RDV au Musée des outils anciens de Chazelles pour découvrir un de ses timbres en fonte, sur le vieux bureau en bois de papa :
Bonne journée à toutes et tous !
Elisabeth B.
Sources bibliographiques :
"Nouveau manuel complet du fabricant de papiers de fantaisie...: de la Fabrication de la cire à cacheter, crayons de mine de plomb, des plumes à écrire, des pastels, etc.." de Fichtenberg (2022)
Le livre "Musée du Ranquet : sceaux et cachets" de Michel Toulemont (1979) édité par la Ville de Clermond-Ferrand est un véritable trésor d'informations pour les passionnés.
Crédits photo :
Photo de Felix Lichtenfeld pour Pixabay
Photo d'Anne-Marie Ridderhof pour Pixabay
Photo de Dmitriy pour Pixabay
Photo du bureau de Jean-Paul Bousquet et se son timbre (dans la vitrine en verre)
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